Checkpoint Charlie
Respirer de concert, inspirer en commun le souffle de l’esprit (c'est-à-dire conspirer)
n’est-il pas le meilleur qui puisse arriver à l’homo sapiens en son destin de sphèranthrope ?
N’est-ce pas un complot contre cette conspiration nécessaire à l’humanité,
que l’actuelle médicalisation du monde passant par l’abolition du pharmakon (remède-poison)
comme du pharmakeus (à quoi Socrate reliait son rôle de sorcier) par l’industrie pharmaceutique ?
Ô Jacques De Decker, l’épouvantable malignité d’un être possédé du daïmôn lui fait te dédier ces lignes inspirées,
auxquelles tu aspires même après avoir expiré, car elles n’auront peut-être pas d’autre lecteur !…
Tel un troupeau beuglant pour exiger toutes les conditions de confort et d’hygiène médicalisés sur un tapis roulant menant à l’abattoir aseptisé,
les technopithèques ne survivent qu'à peine en l’ère thérapeutique. Le médecin s’est substitué au prêtre comme docte et docteur.
Le psychiatre à l’inquisiteur. Les catégories du sain et du malsain, à celles du pur et de l’impur.
Dans les relations sociales, celles de mature et d’immature (d’expert majeur et d’ignorant mineur) à celles d’orthodoxe et d’hérétique.
Baby Mac offre une illustration caricaturale de la figure du pouvoir,
où sainteté et santé se combinent pour garantir un salut médical ayant remplacé le miracle, grâce aux clergés des laboratoires pharmaceutiques.
La normalisation par le sacrement du vaccin vaut plus et mieux que toutes les vieilles eucharisties…
Les journaux ne parlent-ils pas d’une « sanctuarisation » des lits d’hôpitaux ?
Les nouvelles sommités ecclésiastiques n’envisagent-elles pas de « changer les croyances » des populations,
pour les faire accéder à l’universelle communion ?
La vaccination programmée de l’humanité n’est-elle pas menée comme une campagne d’évangélisation ?
Cette nouvelle religion vaccinale n’atteint-elle pas le comble de la tartuferie propre à toutes les confessions,
son synode étant constitué des plus hauts cardinaux de la finance et son souverain pontife étant le chef de la Banque mondiale ?
Tout ceci n’est bien sûr qu’idéologie, dissimulant une socialité cariée par corruption, pollution, dépression,
cadavérisation de toute vie sous les oukases publicitaires du healthy.
Qui met en question le pseudocosme de Kapitotal et de la tour Panoptic sera donc accusé de complotisme,
comme était naguère taxé de diabolisme qui prétendait critiquer les institutions féodales et l’Église catholique…
Radicalement extérieur est le regard du migrateur Gilgamesh, quand il voit le technopithèque en cul-de-jatte acéphale sans colonne vertébrale,
n’ayant d’autre consistance que par la structure de son exosquelette,
mesurable à l’épaisseur conjuguée de son uniforme symbolique et de la tôle métallique lui servant d’habitacle mobile.
Cette évidente régression anthropologique définit le progressisme contemporain ;
toute résistance étant disqualifiée pour cause de conservatisme passéiste et rétrograde…
Or, le héros de la première épopée de l’humanité vient nous rappeler que les livres ont été du feu sauvant les âmes du gel,
une eau les désaltérant au désert : quand on en fait des instruments pour calciner et noyer, puis embourber dans un magma de chair grillée.
Conditions nécessaires à l’emprise pharmaceutique. Est-il anodin que seul ce regard extérieur ait signalé, dans Axiome de la Sphère,
le rôle actuel joué par une publication jugée folle naguère en raison de sa liberté satirique à l’égard du pouvoir,
devenue feuille de propagande gouvernementale officielle,
sans que ce symptôme d’aliénation mentale généralisée par le slogan Je suis Charlie, n’ait donné lieu à la moindre réflexion des milieux intellectuels ?
Il est vrai que la môme Badinter fut à la manœuvre aussi bien dans cette opération de manipulation grossière, que dans Axiome de la Sphère…
L’univers pestiféré – cette peste émotionnelle pandémique diagnostiquée par Wilhelm Reich dans l’Inquisition catholique et le nazisme –
atteint le plus haut pic de morbidité depuis la seconde guerre mondiale, par une soumission complice de ceux-là qui en avaient été les principales cibles.
C’est que le capitalisme de la séduction, fondé sur le marché du désir,
promeut une économie libidinale où le marketing de la domination requiert la mobilisation d’un clergé culturel promettant le salut
par la consommation massive de produits en forme d’art et de littérature, à fins thérapeutiques. L’Inquisition ne traque plus mais embauche l’hérétique.
En même temps se voit prohibée la mission chamanique de medecine man assumée jadis par l’artiste et l’écrivain, remplacée par mille ersatz.
L’industrie du placebo livresque exerce une efficace mise à l’index de ce qui avait été quête de sens en favorisant une prolifération d’insignifiance.
Qui se souvient encore des aventuriers de la langue française ayant exploré Le monde réel à travers La Comédie humaine et
L’éducation sentimentale, À la recherche du temps perdu, lors d'un Voyage au bout de la nuit destiné à découvrir le Tout-Monde ?…
Ainsi les prix littéraires ne diffèrent-ils plus des jeux-concours télévisés, dans un univers de bande dessinée.
Vous évoquez Musil, on vous répond Spirou. De Gaulle voyait juste quand il disait à Malraux n’avoir d’autre rival que Tintin.
Comment en serait-il autrement si les consortiums de l’édition, dont le poids économique est inférieur à celui des videogames,
sont enclos dans des stands gérés par Disneyland ? Ce qui tient lieu d’esprit aux dirigeants de la Silicon Valley,
quand ils conçoivent leurs gigantesques appareillages d’écoute et de collecte d’informations nourrissant le Big Data,
n’a de plus haut modèle que les grandes oreilles de Mickey.
Cette régression dans la symbolisation n’est que l’autre face d’une biologisation de l’expérience humaine,
aux yeux d’un témoin de cinq mille ans de civilisation. Raison pour laquelle il est préférable de faire
comme si Gilgamesh n’existait pas davantage que son Axiome de la Sphère – ou de traiter son témoignage comme un virus à éliminer.
Car, passé quelques années prospères ayant nourri les prolétaires, est venu le temps d’engraisser les actionnaires ;
et la vie entière ne peut plus être qu’un médicament au goût amer. Drogues excitantes et narcotiques en tout genre : There Is No Alternative…
Chaque lieu géographique, aussi bien que chaque espace psychique où il y avait à réfléchir avant d’opter pour une direction ;
chaque carrefour où pouvait s’offrir un choix politique parfois historique,
est devenu lieu de contrôle identitaire sous prétexte sécuri-sanitaire, par la plus puissante force d'occupation militaire.
Les technologies de surveillance renforcée ne laissent d’autre choix qu’un sens unique à deux bandes (gauche/droite),
qu’un Baby Mac invite à emprunter en même temps, ce que la domesticité médiatique entérine comme preuve d’excellence démocratique.
L’Alliance atlantique y voit bien sûr la justification de ses opérations guerrières à l’échelle planétaire.
C’est à parfaire de tels simulacres que fut employé Charlie, fieffé petit mickey grâce à qui, au nom de la liberté,
n’en existe plus d’échapper à ce checkpoint idéologique, sous peine d’être condamné pour conspirationnisme…
Psychopathologie mise en lumière par Gilgamesh au terme d’une errance de cinq millénaires.
Un décret de Vernichtung devait donc être pris contre cet intrus dont le crime est de n’appartenir pas à l’enclos du technopithèque.
Mais qui se trouve-t-il oublietté dans les geôles de l'esprit, sinon son altérité refoulée ?
Anatole Atlas, le 2 décembre 2020
Suite pour envisager toute guerre froide future...
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